Une attitude nonchalente dans un petit corps svelte. Un sourire espiègle derrière un regard d'agneau. Serviable, aimable, poli. Nemrod dit bonjour, au revoir, merci. Nemrod aide la voisine à faire ses course, les vieilles à traverser le passage piéton, il garde vos chiens, ramène votre courrier et tond votre pelouse pour 15 dollars. Nemrod est un garçon, au fond, gentil. Un nez fouineur qui aime faire profiter de son soutien à qui en aurait besoin. Très souvent, on le retrouve embourbé dans des affaires qui ne le concernent pas. Très souvent, il s'impose comme la solution à vos problèmes, que vous le vouliez ou non.
Nemrod est cette providence qui vous tombe du ciel. Cet inconnu qui vous sauve d'une situation délicate. Qui se met en danger lorsqu'il pourrait l'éviter. Nemrod est un ange échoué aux portes de l'Enfer. Car ainsi a-t-il agit toute sa vie. S'immiscer dans la vie d'étrangers n'est pas un problème pour ce garçon. Assez têtu pour s'imposer. Assez courtois pour se faire aimer.
A première vue, c'est un garçon au profil de petit reporter lycéen. A première vue, c'est juste un adolescent qui se prend pour Colombo ou Joséphine Ange Gardien. Une parodie de vieille série américaine qui ne se termine jamais mal. Pourtant, Nemrod n'est pas tombé entre ces murs par hasard.
Nemrod a tué de sang froid, ment comme il respire, manipule comme un politicien. Nemrod n'est pourtant ni violent, ni malade, ni délinquant. Pour qui y observe attentivement, le garçon n'est jamais ce qu'il prétend être. Ne dit jamais vraiment tout ce qu'il pense ni tout ce qu'il sait. Rien en lui ne respire réellement le danger. Seul son dossier met en garde contre ses capacités hors du commun. Son passif est rougit de sang et noir de questions.
Nemrod a eut une formation aux arts martiaux. C'est un acrobate qui n'a peur ni du vide, ni de la vitesse et bien moins des risques. Sa force est celle d'un adolescent de son âge et de son petit acabit. Mais, la précision de ses coups mettraient des montagnes au sol. Il connait l'anatomie humaine comme sa poche. Les zones de douleurs, les points vitaux, ça lui pète aux yeux comme si des cibles y étaient gravées. Quant à celles qui parsèment sont corps, elles sont tant et tant rodées que sa résistance mentale et physique semblent d'acier. Surnaturelles. Continuera-t-il de vous sourire, les tripes à l'air. Il n'est pas difficile de deviner quel milieu difficile et cruel l'a vu grandir. Nemrod a une connaissance poussée de la chimie, de la physique, des mathématiques, de l'électronique et de l'informatique. Sa culture linguistique et littéraire concurrencent parfois certaines grosses têtes universitaires. Nemrod se fond partout. N'importe où. S'adapte aux situations comme s'il les avait toujours vécu. Son langage se calque avec naturel à celui de ses interlocuteurs. Nemrod a cet instinct de survie et d'adaptation farouche. Sauvage, féroce, effrayant. Son grand regard de biche farde un assassin terriblement précis et efficace. Sa bêtise pré-pubère dissimule un génie qui sait être exploité. Ses maladresses attachantes ne sont que jeu d'acteur et agilité monstrueusement bien maîtrises. Avec lui, c'est toujours bon enfant. Mais, faut-il être bien préparé.
Car enfin, tout doué qu'il soit, Nemrod reste un adolescent. Son esprit est immature. Ses frustrations sont instables. Ses caprices sont idiots. Nemrod a la joie de vivre dans les tripes. Il sait prendre plaisir des situations les plus incongrues. Des plus malaisantes. Et très souvent, des plus dangereuses. Le sarcasme facile, la moquerie et l'ironie sont des langages qui lui plaisent. C'est un provocateur et son arrogance atteint parfois des frontière que l'on doit souvent mater très durement. Il n'a souvent aucune raison de sourire face aux menaces. La fierté ? En vérité, Nemrod a appris à ravaler son orgueil. Par dignité ? Peut-être un peu, oui. Mais plus que tout, c'est un farceur dont le principal jeu sera de tester les limites de la patience de ceux qui se laisseront prendre à ses remarques. Tête à claque, de ce que la plupart de ses camarades en pensent. Au grand potentiel, oui. Mais instable et révolté, on se doute qu'il n'obéirait à aucune règle en violant les plus primordiales. Et quand ses petites arrogances débiles menacent de lui être fatales, c'est souvent trop tard. Nemrod connait la salle de retenue aussi bien qu'il connu les salles de tortures, où se mêlent le parfum de la rouille, du sang et de la sueur.
Nemrod est un garçon qui aime les personnalités simples et la gentillesse désintéressée. Les rires sincères et la franche camaraderie. L'esprit d'étudiant et d'un désir de bonté absolument naïf, Nemrod se laisse doucement couler par son nouveau quotidien. Simple, rassurant. C'est un ami que l'on se fait facilement. Et qu'il est difficile de trahir. Cet ancien espion fut tant et tant soumis aux lois du mensonge qu'il lui semblerait naturel qu'un jour, ses propres amis lui tournent le dos ou tentent de le planter par derrière. A-t-il toujours été habitué à se méfier perpétuellement de son prochain. Il n'est pas rancunier et pardonne la trahison. Car sait-il mieux que quiconque que lui-même n'est pas tout à fait blanc. Pourtant, depuis son arrivé, Nemrod a lâché du leste et semble goûter à ce petit coin de paradis qu'est la KU. Toutefois, son esprit révolté semble jurer volontiers avec la discipline qui faisait de lui un excellent agent de terrain.
Et s'il s'amuse volontiers de la frustration de ses surveillants à ne pas savoir faire naître la peur dans son visage, s'il est toujours le premier à rire d'une situation de danger, à remonter le moral des troupes et à s'agiter comme un enfant... Nemrod retourne dans son lit, chaque soir, avec une fatigue amère, une lourdeur dans le creux de l'estomac et l'envie de pleurer en hurlant sa nostalgie. Se contente-t-il d'un "bonne nuit" à lui-même avant de se tourner dans son lit et de rencontrer sa bonne vieille amie l'insomnie.
D'une tendre simplicité, Nemrod à l'air sortie d'une modeste famille anglaise. D'une banalité qui fait sourire. Commune et sans histoire. Sa jeunesse semble avoir été bercée d'histoires de super-héros et de jeux vidéos. Une jeunesse saine. Une jeunesse normale. Sans trouble.
En vérité, la vie de Nemrod est d'une exceptionnelle singularité. Elle se raconte près d'un feu de camp ou lors des soirs d'orage, sous la couette, pour se réconforter. Elle se confie comme un cadeau. Comme un acte de foi. La vie de Nemrod est de celles qui s'offrent sans secret et sans détour. Sans honte. Sans retenue. Toute la vérité ou rien que le mensonge. En vérité, la vie de Nemrod est une longue épopée qu'il garde aussi précieusement qu'un petit bout de son âme. Comme la dernière trace de son identité. Sa dernière vérité.
A quelques kilomètres de Haïfa, dans un petit village très modeste, une vie voit le jour, loin du regard administratif de son pays. Né sur un lit de paille, l'enfant n'existe que dans le cœur de sa mère, fiévreuse et déjà très malade. Le bout de chair, frétillant et gorgé, pourra bien pleurer tant qu'il le voudra. Lorsqu'elle fermera les yeux pour se reposer, la jeune femme ne les rouvrira jamais.
C'est une ombre qui passait par là qui remarquera l'agitation dans cette petite grange. Le silence macabre du village brisé par les cris furieux d'un petit morceau de vie. L'homme est grand, porte un long manteau noir et des lunettes rondes. Il entre dans la grange et voit la chose qui s'agite, près du cadavre gisant de sa mère. Le sang est encore frais. L'odeur agresse les sens. Il s'approche, sans un mot et observe l'enfant sans un sourire.
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Vous n'avez pas le temps, agent Z. Ca ne fait pas partie de la mission, grésille une voix grave et autoritaire dans son oreillette.
Pourtant, Z se penche vers l'enfant. D'un geste appliqué et délicat, il récupère un drap sale et miteux et couvre l'enfant avec. A peine l'a-t-il tenu dans ses bras que la larve se calme et s'endort. C'est si petit. A peine plus gros que la paume de sa main.
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Agent Z, reposez ça immédiatement. C'est un ordre ! Les dégâts collatéraux de nous concernent pas !L'agent lève une main à son oreillette et pose le doigt sur un bouton, sans appuyer.
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Début du protocole d'annihilation. Mise à feu de l'arme Fléau. Fin de transmission, coupe-t-il d'un souffle clair et précis.
L'agent Z sortit d'un geste vif un masque à gaz de son sac. Le posa habilement sur l'enfant et le recouvrit entièrement du drap. Il se servit ensuite de son écharpe pour se couvrir le nez. Puis, il disparut dans la réverbération du désert. Comme il était apparu. Comme un spectre. Quelques minutes plus tard, une vapeur toxique se propagea dans l'air et toute forme de vie dans le village s'évanouit d'un même souffle.
***
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J'ai les codes de sécurité et la cible est éliminée. Et... C'est une fin de mission pour Bibi !-
Parfait, agent N. Je t'envoie un véhicule te récupérer. La voix était féminine et sembla rire d'un ton léger.
Félicitation, gamin... Terminé.Washington DC, 2018. Dans les locaux aménagés d'un ancien siège politique.
De grandes salles blanches ont accueillies l'enfant et sa jeunesse. N'en déplaise à ses supérieurs, Z avait réussi à l'intégrer parmi l'équipe.
Z n'était pas le doyen mais, c'était tout comme. Il possédait le respect de ses semblables et celui de sa hiérarchie. Il était également le plus expérimenté et le plus sage, parmi ses collègues. Ses capacités et sa légende le protégeaient des conflits directs avec ses supérieurs. Il faisait bien son travail et l'on n'avait jamais besoin de le reprendre. Ou presque. Z fardait à peine son aversion pour l'autorité. Dans ce métier, le respect de la hiérarchie est aussi importante que dans n'importe quel corps militaire. Alors, Z détournait les ordres, d'un comportement de passivité agressive évident. Bien souvent, à son profit et celui de ses missions. En violant les règles les plus élémentaires, Z réussissait là où n'importe qui échouait. Ils s'étaient alors dit qu'il serait peut-être appréciable de garder l'enfant. Car enfin, faisait-on aveuglément confiance en l'agent Z. Le héros. La légende.
Armelle était un agent de liaison. Nom de code : Maman. Elle passait beaucoup de temps sur ses écrans et s'occupait des missions d'ordre diplomatiques. Armelle adopta immédiatement l'enfant et Z lui avait donné l'autorisation de choisir son prénom. Elle le baptisa Nemrod. Le roi chasseur. Le révolté. Il sera comme son père adoptif, songea-t-elle avec justesse. Et si la hiérarchie s'était occupé de le renommer N sur les papiers, toute l'équipe continua de s'adresser à lui en tant que Nemrod. Faisant de lui, a quelques mois de vie, le plus jeune membre de l'Agence.
***
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Il n'a que cinq ans, Fitzgerald. Je refuse qu'il soit formé. Z s'imposait par ses épaules larges et son expression stoïque, cachée derrière ses lunettes de soleil. Toutes rondes, comme deux gros orbites qui sondent l'âme. En face de lui, l'homme était petit mais d'une arrogance détestable. Il sourit, comme cordial.
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Vous n'avez pas le choix, agent Z. Il resserra sa cravate.
L'ordre vient d'en haut. Soyez déjà heureux que cet enfant serve la noble cause.Dans ce vieux couloir, la conversation ne dura guère longtemps. Le petit homme fit demi-tour, sans un regard de plus sur l'agent Z. Lorsqu'il s'éloigna, Armelle vint poser une main amicale sur l'épaule de son ami. Aucun mot ne fut prononcé. Tout était dit.
Nemrod était encore tout petit. Z n'avait jamais été vraiment présent. Mais, il fut comme un père pour le jeune garçon. L'autorité et le modèle. Nemrod voulait être comme Z. Voulait être respecté comme Z. Voulait être fort comme Z. Z lui semblait invincible, invulnérable, immortel. Armelle était devenue son enseignante et la mère. Bien que Nemrod l'ait toujours d'avantage considéré comme une soeur. Elle lui faisait faire son alphabet, lui apprenait l’arithmétique et les mathématiques. Nemrod ne l'écoutait toujours que d'une oreille distraite et provoquait ses nerfs avec amusement. L'agent Zippo était l'oncle hyperactif. Partenaire régulier de Z, Zippo s'amusait avec lui, lorsqu'il en avait le temps. Ils jouaient à la guerre, courraient en hurlant dans les couloirs et tentaient d'échapper aux avertissement de Fitzgerald. Amiral passait parfois et lui apprenait les échecs. Il parlait peu et effrayait Nemrod avec son énorme balafre en plein milieu du visage. Quelque part, Nemrod savait qu'Amiral n'offrait son temps et son affection qu'à peu de personnes. Lui faisait-il un véritable honneur. Pour cette raison, l'enfant avait apprit à apprécier le vétéran de guerre. Après quatre ans, la majorité des membres de l'Agence avaient adopté Nemrod. Il devint l'enfant-roi. L'héritier prodige. L'innocente fraîcheur entre les murs cruels de l'Agence. Chacun apporta un peu d'éducation. Mais, personne n'avait jamais eu l'expérience des enfants. Aussi, très vite, le petit garçon apprit la maturité et le désir d'apprendre. Son attitude et ses réflexions s'adaptèrent aux adultes qui, en dépit de toutes leur compétences, étaient bien incapables de s'adapter à lui. Il devint trop intelligent pour son âge. Trop agile. Trop endurant. Il venait d'avoir cinq ans que l'Agence décida qu'il serait formé. Le plus jeune apprenti, disait-on avec fierté, en parlant de lui. Seuls Z et Armelle craignaient de le voir mal finir. Il n'avait besoin que d'un peu d'amour et d'un cadre. Est-il humain de transformer un bout d'innocence en machine de guerre ?
L'Agence. Née dans le courant des années 30, l'Agence avait été fondée par un groupe para-militaire qui avait été portée par la providence à préserver la sécurité des citoyens, durant la guerre. Il s'agissait d'un contre-courant aux organisations d'espionnage nazis. Puis, par la suite, à celle que fonda l'URSS. L'Agence devint rapidement indépendante grâce au financement de la firme Marcowitz. Un groupe pharmaceutique dont certaines activités se voulaient secrètes. Très rapidement, l'Agence s'occupa de camoufler les projets d'armement Marcowitz qui, en échange, finançait et produisait l'arsenal de l'Agence. Très rapidement, l'Agence devint assez puissante pour s'établir à l’international, à l'image du groupe qu'elle soutenait. Cependant qu'elle connaissait une ère prospère, l'Agence se heurta très bientôt la farouche rivalité de la KRT. Les projets de Marcowitz furent découverts et bien que les deux organisations n'eurent rien à reprocher à l'autre, elles s'établirent dans une hostilité méfiante et réciproque. Les méthodes radicales et peu conventionnelles de l'Agence gagnaient à être peu appréciés des Chevaliers. Cependant, il n'y eut aucun incident à déplorer. Seuls les hauts dignitaires de l'Agence et de Marcowitz avaient eu vent de l'infiltration des Chevaliers entre leurs murs. Une taupe que l'Agence avait banni et qui fit bien peu de bruits. Nemrod n'était pas encore né.
Nemrod devint fort, vif, agile, intelligent, cultivé. Il n'avait que dix ans et Z le voyait devenir une créature manipulatrice, pernicieuse et sans état d'âme. On lui faisait réciter le code jusqu'à ce qu'il n'ait plus de voix. On faisait endurer ses nerfs et sa psyché. On martelait son esprit de savoir dont un enfant n'avait pas à connaître. Nemrod était très bon élève. Excellent, même. Il était anormalement fort et souple. Ses réflexes dépassaient les normes établies. Ce n'était qu'un enfant mais, ses capacités physiques et intellectuelles envisageaient quelque chose de terrible, pour l'Agence. Ou de providentiel. Marcowitz préleva son ADN. Il semblait que les supérieurs avaient des doutes sur les liens généalogiques du garçon. Pendant que l'on attendait les résultats, Z, Armelle et Zippo tentaient de préserver au mieux l'innocence du garçon. Nemrod désirait rencontrer des enfants de son âge. Il désirait vivre quelque chose de différent. Il lui était interdit de sortir du bâtiment. Pourtant, Armelle s'occupait d'aider Nemrod à faire le mur lorsqu'elle en avait la possibilité. Nemrod rencontra d'autres garçons. On le trouva bizarre et idiot. Il n'avait aucune référence de son âge. Lui qui n'avait lu que des chef d’œuvres. Qui n'avait vu que des documentaires. Qui n'allait sur internet que pour développer ses compétences en informatique. Il était incapable de reconnaître une seule chanson Disney. Il ne connaissait aucune règle d'aucun de leurs jeux. Il n'avait jamais joué avec des cartes ou des toupies. Dragon Ball ? Qu'est-ce que c'est ? L'un de ses amis lui prêta une console. A l'époque, la l'une des dernières Nintendo faisait carton. Il lui prêta également trois jeux que Nemrod ne rendit jamais. Ces trois jeux qui firent la base vidéo-ludiques de beaucoup d'autres enfants de son âge.
- Les analyses sont claires. Il possède le même gène.
- Il n'est pas exclu que le gène ait pu apparaître chez un autre enfant. Il y a une probabilité non-négligeable qu'il n'ait aucun lien, de près ou de loin, avec lui.
- Je suis navré, Z. Les coïncidences sont bien trop flagrantes. Il est le fils de Samael.
- Il est encore trop jeune pour comprendre. Je préférerai attendre qu'il soit en âge avant de lui annoncer la vérité.
- Non. Il est préférable que Nemrod ne l'apprenne jamais. Nous ne voulons pas qu'il cherche à les contacter. Il pourrait nous nuire, même sans le vouloir. Il se mettrait en danger. Tu comprends ?
- Je comprends. Mais, je le connais : Il finira par chercher la vérité par lui-même, si personne ne satisfait ses questions.
- Ne t'inquiètes pas pour ça. Nous lui donnerons une vérité bien plus adaptée pour lui. Nous te laisserons d'ailleurs la lui livrer. Après, tout... Tu es comme son père, n'est-ce pas ?Nemrod avait 12 ans, lorsque Zippo lui offrit son premier téléphone portable. L'enfant ne mit pas longtemps à comprendre qu'il s'agissait d'un moyen de le moucharder. Il bricola rapidement son smartphone et en fit le seul lien qui le reliait encore au monde du dehors. La vraie vie de la réalité véritable. Les jeux et les dessins animés qu'il téléchargeait sur conseil des ses nouveaux amis lui avaient offert un nouveau souffle. Nemrod découvrait sa jeunesse gâchée. De ses amis, tous ignoraient qui était le garçon. Nemrod ne sortait que rarement et souvent, contre l'avis de ses tuteurs. Il n'était disponible que sur Skype et Facebook, par-dessus lesquels il utilisait toujours un proxy pour camoufler les données.
Les enfant apprennent bien plus vite qu'un adulte. Leur corps retient plus facilement les leçons. Leur esprit reste marqué de leur apprentissage. S'il avait passé huit ans à se conditionner à l'espionnage et à l'assassinat, à l'infiltration et aux techniques martiales, il lui semblait qu'il ne connaissait que ça. L'enfant était devenu un jeune adolescent. Z l'avait vu devenir l'agent le plus jeune qu'on n'ait jamais connu en Amérique. En plus d'avoir reçu l'enseignement et les épreuves nécessaires à sa condition, Nemrod avait largement pu compter sur le soutien et la sévérité de Z pour en faire l'un des meilleurs éléments de l'équipe. Si Z n'avait guère apprécié l'initiative de l'Agence à former un enfant, il préférait sans doute que s'il fusse un espion, qu'il en soit le meilleur de tous. Son digne héritier. Nemrod avait toujours tenté d'être sa fierté.
Pourtant, il fut évident que le mystère de sa naissance restait une question qui taraudait son esprit en quête de réponses. Nemrod avait appris à se débrouiller seul. A enquêter sans l'aide de personne. A se débrouiller avec les moyens du bord. Cependant, s'il ne demanda jamais rien à personne concernant ses parents biologiques, Z avait découvert que l'adolescent avait cherché à fouiller les bases de données confidentielles de l'Agence. Il comprit qu'il était temps de dire la vérité au garçon.
Z prit son fils adoptif dan l'intimité de sa chambre et ils discutèrent longtemps. Nemrod était un enfant orphelin, trouvé dans une rue de Carmelit, une ville d'Israel. Z l'avait trouvé et s'il n'était pas intervenu, Nemrod serait sans doute mort. L'enfant n'avait ni famille, ni parent connu. Ignorant le nom de ses parents, il serait sans doute impossible d'en découvrir plus.
Nemrod fut insatisfait. Un goût amer traversait sa gorge et une colère sourde faisait exploser les veines de ses tempes. Pourtant, il se contenta de cette pauvre histoire. Ou presque. Il enquêta quelque temps, avec les maigres informations que lui avait fourni Z. Cependant, il était d'une triste évidence qu'il ne trouverait rien. L'Agence était sa seule famille. Z, son seul parent.
***
Washington, 2033.Il pleuvait, dans les jardins, ce jour-là. Tous les visages étaient fermés. Un sentiment d'incompréhension flottait dans l'air. Zippo voulu poser une main paternelle sur l'épaule du garçon. Mais, comme animé d'une rage sourde et silencieuse, il repoussa l'affection de l'agent, sans un mot. Juste un mouvement furieux de l'épaule. La pluie effaçait les traces de ses larmes et ne laissait sur son visage qu'une expression de colère. C'était Fitzgerald qui parlait. Nemrod ne comprenait pourquoi c'était à lui d'honorer sa mémoire. Lui qui l'avait toujours méprisé.
Un sentiment d'incompréhension. Mais, pire que tout, d'injustice. Z était mort.
Z avait été en mission, près de la ville détruite de Haïfa. Une balle dans le tête et l'affaire était réglée. C'est son signal qui permit à l'Agence de retrouver son corps. Nemrod était en mission en Europe à ce moment-là et n'avait eut vent de sa mort qu'une fois rentré à Washington.
Son corps l'avait abandonné. Comme si ses muscles s'étaient évaporés d'un seul coup. Ses jambes se dérobèrent sous son poids et toute l'énergie qu'il avait perdu lorsqu'on lui annonça la terrible nouvelle était remontée jusqu'à sa gorge. Il hurla, frappa le sol. Armelle s'agenouilla pour le prendre dans ses bras. Le calmer. Nemrod ne respirait plus. Il tremblait et criait. Pleurait et ne s'arrêtait plus. Elle se pencha sur lui et le serra fort contre elle. Pour qu'il cesse de s'agiter, de hurler. Nemrod sembla fondre comme une bougie. Et se laissa glisser contre sa poitrine, comme un gosse. Il la prit dans ses bras et ses hurlements désespérés se transformèrent en sanglots qui lui déchiraient le thorax.
Il lui semblait être seul au monde.
Armelle frappa à la porte. Aucune réponse. L'Agence avait laissé Nemrod consommer son deuil en paix. Cela faisait une semaine qu'il ne sortait plus que pour se sustenter et s'entraîner. Il ne disait jamais bonjour. Jamais un mot. Il mangeait en silence ou défoulait toute sa rage dans des épreuves qui le laissaient souvent meurtri. Il semblait que personne ne pouvait vraiment le sortir de sa mélancolie. Armelle le savait, Nemrod ne voulait voir personne.
Pourtant, elle entra. La chambre était sombre, glaciale. Le miroir ainsi que le mur avaient été défoncés. Quelques gouttes de sang séchaient sur le rebord des meubles. Et sur son lit, léthargique, Nemrod qui s'enracinait sous sa couette.
Armelle alla doucement vers la fenêtre. Une odeur tenace de sueur alourdissait l'air et l'étouffait. Lorsqu'elle ouvrit les battants et les volets, Nemrod sembla bouger légèrement. Elle devina l'entendre grogner. Lentement, elle vint s'asseoir sur le rebord du lit et laissa glisser sa main dans ses cheveux. Maternelle et d'une tendresse bienveillante. Nemrod ne bougeait pas. Le silence pesa longtemps avant qu'Armelle ne le brise.
-
Je sais ce que tu ressens. Moi aussi, j'ai perdu un parent, il y a très longtemps. Je ne peux pas te garantir que tu tourneras la page. Ni demain, ni un jour. Moi, je ne l'ai jamais tourné. Mais, je sais qu'on y survit. Même si ça parait difficile à croire. Comme elle s'y attendait, l'adolescent n'eut aucune réaction. Mais, en caressant son épaule, elle crut sentir le soubresaut retenu d'un sanglot silencieux. Elle posa une enveloppe à son chevet.
-
N'oublie pas que ta famille est là pour te soutenir. -
Qu'est-ce que c'est ? Sa voix était grave et faible, comme malade. Une voix d'outretombe. Nemrod redressa légèrement la tête vers son chevet.
-
J'ai retrouvé cette lettre en rassemblant les affaires de Z. Elle t'est adressée. Un nouveau silence qui sembla durer une éternité, pour Armelle.
-
Il y est écrit quoi ? Souffla-t-il en tendant une main paresseuse vers l'enveloppe.
-
Je ne sais pas. Je ne l'ai pas lu. Je pense qu'il voulait que tu sois le premier à découvrir son contenu.Nemrod la regarda longtemps, sans un mot. Armelle le regardait avec patience. Puis, elle jugea que sa présence était de trop. En se levant, le garçon se redressa subitement.
-
Attend... Il lui tendit le papier.
J'aimerai que ce soit toi qui me la lise. S'il te plait.Armelle revint. Une expression passagère et éphémère de surprise traversa une seconde son visage. Elle approcha. Pris la lettre en se reposant sur le rebord du lit. Et commença doucement sa lecture. Nemrod la regardait avec de grands yeux vitreux, complètement affalé de tout son long, sur son matelas.
Nemrod,
cette lettre est sans doute le dernier contact que j'aurai avec toi. Alors, je pense qu'il est important que tu saches certaines choses que je ne t'ai jamais dit.
Sache, mon garçon, que j'ai été fier que tu sois le fils que je n'ai jamais eu. Il est vrai que j'ai été un père de substitution très absent mais, cela ne retire en rien à la joie que tu m'as apporté. C'est avec bonheur que je t'ai vu grandir et devenir membre de l'Agence. Je regrette de ne pas avoir pu t'enseigner plus et de ne pas avoir pu partager plus de moments complices avec toi. Mais, qu'importe : Ne doute jamais que je resterai toujours à tes côtés. Et j'espère que tu garderas encore longtemps une place pour moi dans ton cœur.
Je souhaiterai que tu n'oublies jamais ce que je t'ai appris et d'où tu viens. Que tu continues de rechercher la vérité, même lorsqu'elle te semblera évidente. Que tu ne laisses pas l'obscurité atteindre ton cœur mais, qu'au contraire, tu lises ces mots dans une lumineuse clairvoyance.
Ne penses jamais que tu es abandonné car, même après la mort, je continuerai toujours de te guider.
Ton père et mentor, Z.
Ezechiel Redburn.
Armelle resta silencieuse. Puis, posa la lettre sur le chevet. Elle n'avait jamais connu Z ainsi. Elle se senti émue de le découvrir si touchant et des larmes avaient coulés de ses joues. Elle renifla bruyamment et tourna le visage vers Nemrod. Il sembla déçu. Son regard était lointain. Son visage, troublé. Elle n'osa pas demander pourquoi.
-
Je savais que Z t'aimait beaucoup mais... Elle tentait de justifier son excès de sentimentalisme.
J'ignorais à quel point. -
Moi aussi, murmura-t-il, en fixant la lettre. Armelle ne comprenait pas.
-
Je te la laisse. Viens manger, à midi. Il faut que tu sortes de là.Nemrod tenta un sourire peu convaincu et hocha la tête. Armelle se leva et prit la porte. Doucement, elle la referma derrière elle. Nemrod continuait de fixer la lettre. Son instinct hurlait tellement à ses oreilles qu'il ne comprenait pas ce qu'il lui disait. Cette lettre le mettait dans une immonde colère. S'il s'agissait bien de l'écriture de Z, Nemrod était persuadé que toute cette niaiserie dégoulinante n'avait jamais été écrite par l'agent. Z n'était pas comme ça. Z lui aurait légué un dernier mot bien plus sincère. Bien moins convenu. Nemrod froissa la lettre de rage et la balança dans sa poubelle.
- Bon sang, Nemrod... Z était un espion et un guerrier. Il a été tué en mission, le glaive à la main ! Secoue-toi un peu, petit... Quand on travaille pour l'Agence, l'idée de la mort doit être omniprésente ! Tu risques ta vie à chaque instant et je t'assure que personne ne te pleurera quand tu mourras. Même s'il y a de grandes chances pour que tu passes l'arme à gauche prématurément ! Et tu sais pourquoi ? Parce que c'est le risque du métier que l'on a accepté. Alors, oui... Z était un peu comme ton père... Admettons... Ca n'empêche pas que je doute très fortement qu'il aurait voulu te voir dans cet état pour ça.
***
- Comment ça, il n’émet plus de signal ?
- Il a disparu de nos écrans... Personne ne sait où il est. Nous pensons qu'il est peut-être mort...
- Ca fait la troisième fois, cette semaine, qu'on pense qu'il est mort... Retrouvez-moi ce petit con et cette fois, je veux qu'on le foute en salle correctionnelle.
- Oui, monsieur Fitzgerald.Elle m'a regardé. Je le sais, je l'ai vu. Elle a déjà un copain mais, j'ai toutes mes chances. Son copain est con comme une huître. J'arrive pas à croire qu'elle sort avec ce guignole. Demain, je vais tenter une approche.
- On a retrouvé ce mot, dans sa chambre... : "JE RENTRERAI TARD, CE SOIR. NE M'ATTENDEZ PAS POUR DÎNER. BISOU ♥"
- Morveux...On a passé la soirée ensemble. J'étais tellement fini... J'arrivais à peine à marcher. C'était génial. C'est plutôt cool que le vendeur n'ai pas demandé ma pièce d'identité. On est resté toute la nuit à rire comme des demeurés et après, elle m'a invité chez elle. On a continué à boire. Elle m'a fait écouter sa musique. Je lui ai fait connaître mes jeux. On s'est embrassé. Elle m'a montré sa chambre. Le matin, je suis pas resté. Elle me disait qu'elle était amoureuse et qu'elle voulait quitter Ryan. Je me suis pas vraiment posé la question de savoir si je voulais sortir avec elle. Ce serait pas possible, de toute façon. L'Agence ne me laisserait pas avoir une vie de couple. Genre... Une vraie. Comme dans les films.
- Monsieur Fitzgerald... Il a juste besoin d'un peu de temps et de liberté. C'est un ado. Et c'est très dur pour lui, depuis la mort de Z.
- Je n'en ai rien à foutre. Quand on termine une mission, on fait un rapport. On disparaît pas dans la nature pour courir derrière les filles ! On a l'air de quoi ?
- Au moins, il les réussi... Ses missions.
- Armelle... J'ai une envie très soudaine de vous frapper. C'est vraiment fâcheux... Disparaissez de ma vue... Ils sont venu me chercher. J'étais encore à côté du lycée. Je leur ai fait croire que je m'appelai Rodney. Que j'avais des cours à domicile. Ils m'ont vite accepté dans leur groupe. Je dirais que l'alpha était ce type avec des dreadlocks. Freddie, je crois. Un baraque, très serein. Ou très stone. Un genre de force tranquille. Je les ai accompagné au bowl. C'est la première fois que j'en faisais. Du skate. Mais, j'ai du leur dire que je pratiquai souvent le freestyle. Quand Armelle est venu me chercher, Vincent s'est moqué de moi. Armelle s'est toujours faite passer pour ma mère, en mission. C'est toujours plus simple. Mais, Vincent est sympa. Quand je lui ai dis que je ne pourrais plus jamais revenir - Armelle m'avait confirmé que j'étais peut-être allé un peu loin avec la patience de Fitzgerald... - il m'a donné son second skate. Il manquait une roue depuis des années, il m'a dit. Ce serait pas compliqué pour moi de le réparer.
- Je veux m'inscrire dans un lycée. J'ai les compétences et puis... Ca m'aidera à mieux comprendre ce milieu ! C'est toujours bon pour mon expérience...!
- Certainement pas, Nemrod. Tu feras ce qu'on te dit. C'est terminé, l'époque où tu étais l'enfant-roi. Maintenant, tu es un adulte : comporte-toi comme tel.
- Oui, monsieur Fitzgerald.
- Bien. Maintenant, dégage. Tu m'as assez énervé.
- D'accord, monsieur Fitzgerald. Monsieur Fitzgerald ?
- Quoi encore...?
- Vous avez un morceau de salade coincé entre les dents, depuis tout à l'heure.
- ... Foutez-moi ça en salle correctionnelle...Salle correctionnelle, d'entretien, d'isolement,... Tant d'autres mots pour désigner une salle de torture. On y envoyait les agents indisciplinés, désobéissants. Ainsi que les traîtres et ceux que l'on interrogeait. C'était ainsi qu'on endurcissait les agents en faisant travailler leur rigueur. Nemrod y passa de longues heures. Son corps s'habitua à la douleur. Il devint de plus en plus insolent. Avait de plus en plus de mal à s'en tenir au ordres, durant les missions. Toutefois restait-il toujours si efficace. Il sembla qu'après un an, Nemrod avait achevé son deuil. Il avait retrouvé son sourire, son humour et son énergie.
Un jour, Fitzgerald céda. Armelle et Zippo avaient tant insisté et soutenu le garçon qu'on avait fini par lui trouver une mission. Très simple et rapide, dans un petit village des USA. Un tueur en série et hacker qui sévissait. Ils y avaient envoyé l'un de leur agent expérimentés mais, le hacker l'avait très vite découvert et avait les compétences nécessaires pour démunir leurs meilleurs informaticiens. Derrière un ordinateur, ce tueur était inaccessible. Armelle s'occupa de lui créé une identité. Elle l'inscrivit au lycée du coin et Nemrod s'en alla enquêter. On lui laissait un an. En vérité, il s'agissait d'avantage de vacance que d'une véritable mission. Fitzgerald avait beaucoup grogné.
Nemrod découvrit la joie du lycée. Les cours, les casiers remplis, les guerres de réputation, les jeux de séduction... Nemrod se fit d'abord ami de deux garçons avec qui il discuta beaucoup jeux vidéos et comics. Il découvrit les jeux de rôle, les bars de gamers, les expositions et conférences informatiques. Il se fit vite la célèbre réputation du geek. Ainsi, le prédateur naturel du geek, c'est connu : Les footballeurs. Un jour, l'un des membres de l'équipe vint le voir avec une gueule peu recommandable. Il postillonnait que Nemrod avait mal regardé sa copine et avait tenté de le bizuter. Sous ses sweets Nemrod est un trompe-l’œil remarquable et ne semble pas bien épais. Il n'eut aucun mal à humilier son adversaire. Sa côté de popularité grimpa. Il devint délégué de classe assez rapidement. Puis, s'intéressa à l'une des filles de son bahut avec qui il passa de mémorables soirées cinéma. Il ne se passa étrangement rien entre eux. Nemrod savait que leur idylle ne durerait guère longtemps. Préféra-t-il seulement profiter de sa présence. Il en avait tous les symptômes : Il tombait amoureux.
Quand vint la fin de l'année, Nemrod avait acquis un groupe d'amis fidèles, entretenait une étrange relation platonique avec sa copine et ne voulait plus quitter sa vie banale. Il vivait une chose pour laquelle il était fait : Etre un adolescent. Cependant, toute bonne chose a une fin. Lorsque vint la fin de l'année et que Fitzgerald lui ordonna d'achever sa mission, il réussi à obliger le hacker à se trahir et à se montrer. Il le mit à terre, rassembla les preuves de sa culpabilité et le rendit à la police de manière anonyme. Les médias s'étaient amusés à nommer cet inconnu "Le Super Héros de Orange". Tous ses amis s'étaient mis à fantasmer sur son identité. L'un d'eux plaisanta à moitié en supposant qu'il s'agissait de Nemrod. L'agent l'avait senti : Si son ami avait utilisé le ton de l'humour pour ne pas paraître parano devant les autres, il en était pourtant persuadé.
Nemrod disparut de la ville sans donner de nouvelle à personne. Pourtant, il laissa un seul mot à sa copine et garda son numéro malgré le code de l'Agence qui interdisait tout contact avec les civils.
Nemrod s'attrista d'abord de devoir reprendre sa vie d'espion et d'assassin mais, fut heureux d'avoir vécu celle d'un personnage de série teenager, comme dans les films, à la télévision.
***
Cela fait une semaine qu'elle trônait, toute froissée sur sa table. La lettre de Z. Nemrod passait son temps à la regarder sans comprendre ce qui le gênait. Il la relisait. Encore. Encore. Et, sans en être tout à fait convaincu, comme un gosse à une séance de spiritisme, il leva le bout de papier vers une ampoule.
Et par dessus les lettres et les mots, un nouveau texte apparu.
Si tu lis ces lignes, c'est que tu as compris mes intentions. J'espère sincèrement que tu seras assez doué pour réussir à les cerner.
J'écris cette lettre avant ma mission à Haïfa car je sens qu'on ne me renvoie pas une nouvelle fois là-bas pour rien. Et si je meurs, c'est que mes doutes se seront révélés justes et que j'ai sans doute découvert des choses que l'Agence souhaite cacher. Méfies-toi, comme je te l'ai appris. Personne n'est ton ami.
Tu dois savoir, Nemrod, que tu n'es pas né a Carmelit mais, à Haïfa. J'y étais envoyé pour mettre en place les lanceurs de l'arme Fléau. Une arme bactériologique, dangereuse et meurtrière. Une fois déployée, elle devait détruire tout un village. En faisait des recherches, j'ai découvert pourquoi nous avions déployé cette arme à cet endroit précis.
On nous avait d'abord dit qu'il s'agissait d'un camp paramilitaire de rebelles. Puis, par la suite, j'ai appris que l'un des anciens membres de l'Agence, un traître, était à la tête de ce groupe. Comme je te l'ai dis, lorsque je t'ai découvert, tu venais à peine de naître et ta mère était déjà morte.
Cet ancien membre de l'Agence était en vérité un agent double, travaille pour un groupe rival dont le QG se trouve en Angleterre. Tu as déjà entendu leur nom : Les Chevalier de la Table Ronde. Envoyé espionner nos agissements, ce Chevalier a été découvert et poursuivi par nos services jusqu'à Haïfa. Les prélèvements sanguins ne laissent aucun doute : Tu es le fils de ce Chevalier. Nom de code : Samael.
Par la suite, j'ai découvert que Marcowitz était le père du Fléau et qu'il cherchait depuis plusieurs années à faire tester son arme sur des organismes vivants. Et que les Chevaliers ont tenté d'arrêter leur démarche. D'après mes recherches, il semblerait que les premiers conflits entre l'Agence et la KRT vienne de là. Aussi, je suppute que cette arme serve à l'Agence comme une nouvelle arme nucléaire. Elle dissuade les ennemis d'attaquer et pousse les gouvernements les moins développés dans le domaine de l'armement à se soumettre à leur exigence.
Je ne doute pas une seule seconde du piège qui m'attend à Haïfa. Mais, j'y trouverai sans doute des réponses. Si je refuse, ils comprendront quelles informations j'ai découvert et pourraient tenter de t'utiliser pour me forcer au silence. Si je m'enfuis, je vous mets tous en danger.
J'espère que j'ai tort et que je serais le seul à lire cette lettre. Cependant, si j'ai raison, les vérités que j'aurais découvert à Haïfa me coûteront la vie. Tu dois continuer ma mission, coûte que coûte. Ne te fie à personne de l'Agence. Armelle, Zippo, Amiral, Fitzgerald... Tous sont potentiellement tes ennemis. Si tu souhaites du soutien, il faut que tu prennes contact avec les Chevaliers.
Ton père, Samael, s'appelait John Sherman. J'ignore s'il est réellement mort ou s'il persiste encore. Tout ce que je sais c'est qu'il te sera impossible de les contacter. Tu devras te faire repérer à les Chevaliers qui viendront d'eux-même à toi.
Bonne chance. Et ne fais pas l'idiot.
Parle-nous rapidement de toi derrière l'écran. Quel est ton nom ? Quel âge as-tu ? Comment as-tu découvert le forum ? Lache-toi.